La revue

« Tout est brouillon en effet, l’idée de texte définitif ne relevant que de la religion ou de la fatigue. »
Jorge Luis Borges

Papier Machine est une revue de création, une publication hybride qui accueille tous celles et ceux qui veulent s’immiscer avec politesse (ou fracas) dans les interstices du langage et de la langue française. Pour chaque numéro, le comité éditorial élit un mot-étincelle à l’origine de toutes les contributions, toutes inédites.

Choisir un mot, c’est se pencher au ras des pâquerettes et cueillir la matière première de nos langages, c’est le considérer comme l’atome du langage. Les mots sont des portes ouvertes, quand ils ne sont pas des prisons dont les murs sont formés par les sédimentations de leurs histoires locales. Choisir un mot c’est observer la roche sémantique, se focaliser sur notre rapport au réel et le voir de plus près, c’est-à-dire soit plus gros, soit plus flou, mais rarement plus net.
Choisir un mot circonscrit dans le langage que l’on partage au quotidien, puis ouvrir le dictionnaire et constater l’édification d’une multitude de surprenantes possibilités, pour ensuite l’éclairer à la lumière de nos prédilections, de nos champs d’exploration, de nos expériences. Ces processus d’interprétations emmènent tous ceux qui s’y frottent d’une petite chose simple et singulière, vers des ramifications multiples, vers de la complexité – celle du monde et de l’universel.
Choisir un mot, c’est questionner les lianes qui rattachent le mot et la chose, qui s’accrochent et se tissent à ces autres végétaux que sont nos structures de pensée, nos paradigmes dominants, nos discours sous-jacents. Prendre de l’élan, sauter de liane en liane, rencontrer les obstacles, cartographier les entraves.
Choisir un mot, pour le malaxer, le ressasser et le tordre selon son humeur, se l’approprier, l’assermenter, le couler dans l’or ou dans le bronze, jusqu’à le réduire en poussière, puis le rendre transfiguré et le cracher à la face du monde, parce que les mots sont un terrain de jeu collectif. Papier Machine est une plate-forme d’expérimentation à l’usage des malpolis, des rustres qui prennent le temps d’égratigner l’habitude et de gratter le vernis déposé par le temps.
Choisir un mot comme contrainte créative, c’est mettre au jour ces liens prétendument figés qui lient le mot et la chose, créer des interstices dans le réel et y organiser une fête.

Papier Machine se veut poétique, considérant la poésie non pas (seulement) comme un genre, mais comme un rapport au monde, une direction à suivre. « La poésie ne veut rien prouver du tout » écrivait Paul Ricœur. Nos contributeur·rices cherchent à poétiser le réel, ce qui ne revient pas à en fixer une image définitive, mais à capter son mouvement, sa complexité, sa diversité.

Papier Machine invite à participer toustes celleux qui ont le questionnement exigeant et le langage curieux ; toustes celleux qui veulent expérimenter la confrontation des discours, leur porosité, avec l’outil qui leur est propre, quel qu’il soit. De la sociologue au journaliste, en passant par la photographe, l’astrophycisienne, l’illustrateur ou l’architecte, sans oublier – par exemple – ni le vigneron ni la taxidermiste, Papier Machine est le carrefour où se rencontrent les champs d’exploration de notre quotidien sans jamais l’asservir « aux bâtons flottants de l’actualité » pour reprendre les mots cravaches de Balzac.

Papier Machine, sans prôner la monarchie du papier, veut échapper à la guillotine du tout-numérique pour offrir un espace physique de rencontre entre des univers et des pratiques différentes, au-delà des cloisons disciplinaires, où chacun·e accepterait de se plier aux contraintes de la culture imprimée.

Sans transition, sans chercher de cohérence autre que celle de la liberté de création et d’expression, sans peur de l’incongru. Parce que nous avons confiance en l’esprit humain, en sa capacité à construire des ponts sans passer par l’autoroute, en sa capacité à tisser des liens, des contradictions et des affinités, et parce que l’incongru est peut-être, justement, la plus belle et inspirante des aventures. Si notre format est bizarre (19x27cm), comme l’irrévérencieuse revue éponyme, c’est aussi parce que nous pensons avec André Breton, que le beau provient de l’étincelle, comme celle produite par « la rencontre fortuite d’un parapluie et d’une machine à coudre sur une table de dissection », que le beau c’est ce qui nous surprend, ce qui nous fait bondir, tressaillir ou simplement sourire.

La revue est Bruxelloise de naissance, mais est également diffusée en France, en Suisse et au Québec.

On n’est jamais trop pour piétiner les plates bandes du vu et tirer dans la gamelle du revu.

Venez vous frotter au mot élu.

Avec le soutien de la Fédération Wallonie-Bruxelles – Service de la Promotion des Lettres, du Centre National du Livre (France) et du Fonds national de la Littérature (Académie Royale de la Langue et de la Littérature Françaises de Belgique).

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